
Envoyé par
Sandra Coret
Malgré cela, 72 % des personnes interrogées ont déclaré avoir perdu des membres de leur équipe informatique, 41 % d'entre elles citant une charge de travail élevée comme principale raison de leur départ.
Les autres sources de mécontentement sont les attentes irréalistes placées dans l'équipe (34 %), le manque de soutien de la part de la direction (32 %), le travail à distance qui n'est pas une possibilité (28 %), l'hésitation de la direction à adopter l'automatisation (26 %) et le manque de technologies essentielles pour faire efficacement leur travail (24 %).
Ces raisons sont valides, mais je ne vois pas la mention du pognon, qui est pourtant le facteur principal de turnover dans le monde du développement de logiciels. Actuellement, pour la majorité des développeurs, la manière la plus efficace de progresser dans sa carrière est de changer régulièrement d'entreprise, ce qui aurait été absurde dans une économie rationnelle.
Certes, quand on travaille dans une entreprise, on acquiert des connaissances réutilisables dans d'autres entreprises, ce qui interviendra dans la négociation du salaire quand on cherchera du travail ailleurs. Mais on acquiert aussi d'autres connaissances qui ne servent que là où on travaille.
Du coup, dans une économie rationnelle, les entreprises chercheraient à garder la plupart de leurs salariés en leur donnant un salaire au dessus du marché, car c'est plus rentable d'avoir quelques développeurs qui vont vite grâce à leurs vastes connaissances du système existant que de faire travailler un plus grand nombre de développeurs qui vont passer beaucoup de temps à découvrir le système en place.
Ce problème est bien illustré par l'article
Why Don't Tech Companies Pay Their Engineers to Stay? dont voici un graphique qui montre la situation absurde dans la plupart des entreprises :

Le salaire qu'on gagne dans l'entreprise courante (en rouge) évolue moins vite que le salaire qu'on toucherait en changeant d'entreprise (en bleu) qui évolue moins vite que la productivité qu'on a dans l'entreprise courante (en vert).
Mais l'article ne dit pas comment raisonne un gestionnaire en charge du budget qui augmente peu ou pas ses développeurs. J'ai plusieurs hypothèses possibles :
- "Les développeurs sont interchangeables. Qu'ils soient là depuis 3 mois ou 3 ans, cela ne fait pas vraiment de différence de productivité." Si le gestionnaire croit que c'est vrai sur un système devenu complexe, alors il vit dans un monde imaginaire complètement déconnecté des réalités du développement de logiciels.
- "Ce développeur a un niveau en dessous de la moyenne de ceux qu'on recrute, donc il vaut mieux le laisser partir pour qu'un autre meilleur développeur le remplace." Mais, en général, un gestionnaire ne peut appliquer ce principe qu'à une partie des développeurs recrutés, pas à tous les développeurs.
- "Ce développeur est rentable et serait plus payé ailleurs mais ne va pas partir, car c'est un pigeon qui ne connaît pas sa valeur sur le marché, ou car il sait qu'il peut gagner plus ailleurs mais ne veut pas bouger." Mais ce ne serait pas cohérent d'appliquer ce raisonnement à tous ses développeurs et se plaindre en même temps du turnover.
- "Les développeurs ne seront pas plus payés ailleurs, donc il n'y a pas besoin de les augmenter." Ah, merde, si. Au bout d'un moment, le gestionnaire devrait s'en rendre compte.
- "On a toujours augmenté peu les développeurs et les autres entreprises font pareil que nous. On ne va quand même pas changer nos habitudes de gestion de budget ! Ce serait une hérésie !" Cela explique bien l'inertie du système en place, mais pas de comment il est initié.
Pour les autres pays, je ne sais pas mais, en France, étant donné que la majorité des postes sont en SSII, je pense que l'hypothèse la plus crédible est que les gestionnaires en charge du budget voient les développeurs comme interchangeables.
Pour conclure, la raison pour laquelle les entreprises perdent des développeurs, en général, c'est qu'elles ne cherchent pas à les garder ! Sinon, les développeurs qui changeraient régulièrement d'entreprise gagneraient en moyenne moins que ceux qui restent longtemps dans la même entreprise.
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