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L'Allemagne va publier un projet de loi qui fait du télétravail un droit légal
Tandis que l'exécutif français s'achemine vers un accord non contraignant avec le patronat

Le , par Patrick Ruiz

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Le ministre allemand du Travail l’avait déjà fait savoir lors d’une sortie au cours du mois d’avril de l’année en cours : les employés devraient avoir le droit de travailler depuis leur domicile, ce, surtout que la pandémie de coronavirus l’impose désormais. Un projet de loi est en cours dans gestation pour aller dans ce sens. Hubertus Heil annonce sa publication dans quelques semaines. L’exécutif français pour sa part ne prévoit pas de mesures contraignantes pour des raisons de conservation des intérêts des collectifs d’entreprises – un pan sur lequel le projet allemand est critiqué en interne.

Le projet de loi vise à garantir que les travailleurs ont la possibilité de travailler à domicile lorsque cela est possible, ainsi qu'à réglementer le travail à domicile. L'une des formules explorées est celle de la limitation des heures de travail. Il vise un renforcement des droits des travailleurs en matière de travail à distance et l’établissement de frontières plus claires entre vie personnelle et professionnelle pour les employés lancés sur ce créneau. Grosso modo, le projet de loi vise à répondre à la question de savoir : comment procéder pour tirer le meilleur parti des progrès technologiques afin de toujours garder la productivité des employés en télétravail à son meilleur niveau ?

Plusieurs politiciens allemands soutiennent cette proposition de loi. Le vice-chancelier Olaf Scholz que la mise sur pied d’une telle loi est une bonne occasion pour le pays de ne plus revenir aux anciennes méthodes c’est-à-dire au présentiel. Katrin Göring-Eckardt, chef du groupe parlementaire du Parti Vert allemand, salue également cette suggestion. Elle demande entre autres le droit à l'internet haut débit pour permettre aux employés de travailler plus efficacement depuis leur domicile. La proposition de loi se heurte néanmoins à des critiques sur au moins deux axes : primo, l’affaiblissement de la capacité des travailleurs à s'engager dans des négociations collectives ; deuxio, la porte ouverte à l’externalisation des emplois vers des pays où les normes de travail sont moins strictes. Les premiers retours font état de ce que le projet de loi ne devrait pas être contraignant pour les employeurs. Toutefois, l’idée de « règle nationale » en matière de télétravail se dessine en Allemagne.


En France, la ministre du Travail Elisabeth Borne reconnaît que « le recours au télétravail est un mode d’organisation pertinent pour réduire la propagation du virus » et d’ajouter qu’ « il permet de limiter les contacts au travail, mais aussi aux abords du lieu de travail et dans les trajets domicile-travail. Sa mise en œuvre doit respecter un équilibre entre plusieurs objectifs. Tout d'abord, éviter la propagation du virus, mais aussi maintenir l'efficacité des organisations de travail et enfin, prévenir les risques liés à l'isolement des salariés. Cet équilibre doit se construire dans le dialogue social au sein de l'entreprise. »

Dans la pratique, la seule contrainte à laquelle les employeurs devront faire face en France sera de fixer un nombre de jours de télétravail.

« Ce matin, avec Laurent PIETRASZEWSKI nous avons réuni les partenaires sociaux pour faire le point sur la mise en œuvre du protocole national en entreprise et évoquer les adaptations à y apporter. Je voudrais souligner que les échanges ont montré un très fort, une très forte responsabilité de la part de l'ensemble des partenaires sociaux, mais également le constat partagé sur l'efficacité du protocole. Nous avons décidé d'apporter deux modifications principales au protocole national. Il est désormais demandé aux entreprises, et tout particulièrement à celles qui sont dans les zones où s'applique le couvre-feu, de définir un nombre de jours minimal de télétravail par semaine pour les postes qui le permettent et également d'étaler les horaires d'arrivée et de départ au travail.Les modalités de mise en œuvre, par exemple le nombre de jours de télétravail, doivent faire l'objet d'un dialogue social au sein de l'entreprise », a-t-elle ajouté.

Le président français lui-même est d’avis que « le télétravail est un outil pertinent quand il est utilisé intelligemment et négocié au plus près du terrain. » Il adhère néanmoins à l’idée selon laquelle c'est une formule susceptible de fragiliser les collectifs d’entreprise et les employés locaux et donc rejette l'idée qu’il faille en faire une « règle nationale » comme en Allemagne. Le président français a insisté sur la nécessité pour les entreprises de poursuivre leur activité et pour les services publics de rester ouverts. Il a appelé à maintenir, quand c’est possible, le travail à distance « deux à trois jours par semaine », dans la mesure où il contribue à « diminuer les flux » dans les transports.

Les développements en cours suggèrent que l'exécutif français s'achemine vers un accord non contraignant avec le patronat. Les syndicats ont voulu que ce soit un accord national, et non des accords par branches, ce que voulait le patronat. En raison de cette exigence, les obligations/restrictions/décisions qui seront inscrites au sein de cet accord devront pouvoir s'appliquer de la même façon à un maçon, à un serveur de restaurant, à un développeur web, à un ouvrier d'usine, à une standardiste et à un responsable de service.

Sources : Interview du ministre allemand du Travail (paywall), Conférence de presse de m. jean Castex

Et vous ?

Qu’en pensez-vous ?
La France devrait-elle suivre l’exemple allemand sur ce dossier ?
Qu’est-ce qui fait la pertinence des critiques à l’encontre du projet de loi allemand en matière de télétravail ?

Voir aussi :

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Avatar de openlowcode
Membre régulier https://www.developpez.com
Le 16/10/2020 à 7:08
Il faut à mon avis séparer le cas général de la pandémie actuelle. En ce moment, on est évidemment mieux chez soi que dans un bâtiment sans fenêtres qui s'ouvrent avec des collègues qui portent le masque sous la bouche.

Je crois que l'intérêt pour les travailleurs (et l'entreprise) du télétravail dépend des circonstances:
  • Quand on travaille dans une usine, on doit aller à l'usine
  • Evidemment, si on a un logement exigu et bruyant (enfants en bas âge), on peut être mieux au bureau.
  • Quand on vit seul, on est content d'aller au bureau et rencontrer les collègues
  • Si on n'est pas capable de travailler sans la pression implicite des voisins de bureau, on est mieux au bureau
  • Pour commencer dans un nouveau poste, on est mieux au bureau
  • Quand on travaille dans un open-space bruyant ou un immeuble peu agréable, on est souvent mieux chez soi
  • Quand on a 90 minutes de trajet, on est mieux chez soi.


J'en veux pour preuve que tout n'est pas si simple que certains indépendants ne travaillent pas chez eux, mais choisissent de payer pour être dans un espace de co-working (un ... bureau).

Je ne sais pas comment trouver le bon équilibre sur le sujet, et inciter légèrement les managers à développer le télétravail autant que possible, tout en étant flexible vu l'infinité de circonstances. Il pourrait y avoir des primes spéciales pour ceux à qui on impose d'être présent au travail, ou le remboursement des trajets par l'entreprise (système présent au Japon ou l'employeur paie l'intégralité des frais de transports en commun).
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Avatar de el_slapper
Expert éminent sénior https://www.developpez.com
Le 16/10/2020 à 12:58
Citation Envoyé par openlowcode Voir le message

Je crois que l'intérêt pour les travailleurs (et l'entreprise) du télétravail dépend des circonstances:
  • Evidemment, si on a un logement exigu et bruyant (enfants en bas âge), on peut être mieux au bureau.

ça, c'est moi. Mais ton inventaire à la Prévert (que j'adore) souligne un point plus général : les politiciens cherchent des solutions applicables partout. Et offrent des solutions inadaptées parce-que bien trop larges.
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Avatar de xarkam
Membre éprouvé https://www.developpez.com
Le 16/10/2020 à 11:14
Il faut trouver le juste équilibre.
J'en discutait hier avec ma femme, dans l'absolu c'est un bon moment pour les entreprises de revoir la composition des équipes.
Créer des équipes de gens qui veulent être en télétravail et des équipes de gens qui veulent être au bureau.
Les gens en télétravail ont une manière de communiquer qui est assez efficace. Les outils actuel offre une éventail de fonctionnalités assez riche pour ne pas sentir un frein dans l'accomplissement des tâches.

On demande aux employés d'être ultras flexible. C'est une occasion pour demander aux entreprises de l'être aussi dans la manière de travailler.
La flexibilité pour la rentabilité ce n'est pas à sens unique.

Par contre, il faut laisser une opportunité aux personnes en télétravail de pouvoir se retrouver tous ensemble au bureau de temps en temps car se voir en vrai ca compte aussi.
Un peu à la manière des très grosses entreprises US qui ont mis en place le télétravail de manière structurelle.

Globalement, dans l'IT le télétravail a boosté la productivité. Il a fallu un temps d'adaptation mais les résultats commencent à se voir.

Pour beaucoup de personne, cela leur à apporté un meilleur équilibre entre vie perso et vie pro.
Les longs trajets du matin avec les embouteillages sont terminés. On a donc plus de temps pour dormir ou faire autres chose.
On est plus souvent avec sa famille, on partage donc plus de choses, etc... (on se sent moins dans la routine boulot, métro, dodo)

Je pense qu'une fois cet histoire de virus passée et que l'économie aura repris, rester sur un modèle semblable à l'actuel pourrait booster la consommation.
Si on a plus de temps libre, on peu donc faire des choses qu'on ne pouvait pas faire avant. (genre salle de sport, activité culturelle, etc...)
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Avatar de blbird
Membre chevronné https://www.developpez.com
Le 16/10/2020 à 18:37
Citation Envoyé par openlowcode Voir le message
J'en veux pour preuve que tout n'est pas si simple que certains indépendants ne travaillent pas chez eux, mais choisissent de payer pour être dans un espace de co-working (un ... bureau).
C'est extrêmement minoritaire et peut difficilement être utilisé comme "preuve" quand même.
Après, la plupart des arguments peuvent être tournés dans un sens ou dans l'autre. Certains travaillent bien mieux sans la pression de leur collègue, ou le passage de "responsables" qui n'ont que ça à faire pour justifier leur poste.

Mais ce qui m'amuse le plus, c'est de voir tant de raisons de ne pas pouvoir ou vouloir faire du télétravail, alors qu'à ma connaissance, on a jamais demandé à ceux qui ont toujours eu l'obligation de venir travailleur au bureau s'ils étaient d'accord ou pas.
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Avatar de TotoParis
Membre expérimenté https://www.developpez.com
Le 25/10/2020 à 15:07
Une fois de plus le MEDEF fonctionne comme des gaulois réfractaires à une évolution inévitable des modes de travail, alors qu'il est lui-même très directif, voire autoritaire quand c'est lui qui décide que cela sera comme ça et pas autrement. Et des propositions de rupture conventionnelle ont été émises en pleine période de confinement.
Un autre aspect est la sécurité informatique à domicile. En effet, des attaques massives sur les les serveurs DNS d'un grand FAI français a été menée courant de ce mois. Comment s'en prémunir ? En changeant les adresses IP de ces serveurs dans votre box pour en choisir d'autres, bien plus robustes. Question : que choisir ? En effet, les réseaux grand public n'ont jamais été conçus pour un tel usage aussi massif : c'est aussi très probablement une des causes de la réticence des employeurs sur le développement du télétravail à une telle échelle.
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