Google reste ferme sur sa position : le lieu de travail n'est pas un champ clos pour les luttes politiques, idéologiques, littéraires. « Google est une entreprise et non un endroit où l'on peut agir d'une manière qui perturbe les collègues ou les fait se sentir en danger », a déclaré le PDG Sundar Pichai dans un courriel interne aux employés. Depuis, Google semble avoir commencé à faire le ménage dans ses rangs, notamment en mettant à la porte les employés qui ont des revendications politiques. Dans un premier temps, Google a licencié 28 employés juste après le sit-in qui a perturbé ses bureaux à New York et à Sunnyvale.
Un nouveau rapport indique que Google a licencié au moins 20 travailleurs de plus. Jane Chung, porte-parole de No Tech for Apartheid, l'association qui a organisé la manifestation et représente les travailleurs, affirme à que la dernière série de licenciements portait à plus de 50 le nombre total de personnes licenciées en rapport avec l'incident. « Les récents licenciements concernaient des spectateurs non participants », a ajouté Chung, qui a déclaré au Washington Post que ces licenciements montraient que "Google tentait d'étouffer la dissidence, de réduire ses employés au silence et de réaffirmer son pouvoir sur eux".
Hasan Ibraheem, un jeune homme de 23 ans, l'un des employés licenciés, affirme que la réponse de Google est disproportionnée et constitue la preuve que l'entreprise est prête à prendre les mesures de représailles les plus strictes contre les travailleurs qui tentent de faire entendre leurs voix. Il accuse Google d'être non seulement complice d'un prétendu "génocide" à Gaza, mais aussi d'entretenir un environnement interne "fasciste". Il invite les autres employés du secteur technologique à dénoncer les entreprises qui travaillent avec Israël et à ne pas avoir peur des représailles. Son avis ne fait toutefois pas l'unanimité.
Un porte-parole de Google a confirmé que l'entreprise avait licencié d'autres travailleurs dans le cadre de son enquête sur la manifestation, mais a souligné que chacune des personnes qui ont été licenciées était personnellement et définitivement impliquée dans des activités perturbatrices à l'intérieur des bâtiments de Google. Le porte-parole de Google a ajouté : « notre enquête sur ces événements est maintenant terminée ». La dernière série de licenciements est intervenue quelques jours après que Pichai a abordé la question du sit-in et des manifestations avec des mots fermes dans le courriel interne adressé aux employés.
Pichai a souligné que bien qu'il soit important de préserver "la culture de discussion ouverte et dynamique" au sein de l'entreprise, Google reste un lieu de travail avec des règles et des attentes claires pour ses employés. Pichai a exhorté les travailleurs à mettre de côté les perturbations et à faire passer la "mission en premier" en cette période cruciale. « Lorsque nous venons travailler, notre objectif est d'organiser l'information mondiale et de la rendre universellement accessible et utile. Cela prime sur tout le reste et j'attends de nous que nous agissions avec une attention qui reflète cela », indique le courriel du PDG de Google.
Les manifestations chez Google font partie d'une vague d'opposition au gouvernement américain et aux entreprises qui travaillent avec le gouvernement et l'armée israéliens. Des manifestants propalestiniens ont été arrêtés dans les universités de Yale et de Columbia, ce qui a donné lieu à des accusations d'intervention musclée de la part des autorités universitaires et a inspiré une autre vague de manifestations dans d'autres universités à travers le pays. La veille des sit-in de Google, des militants ont bloqué des autoroutes, des ponts et des entrées d'aéroports à travers les États-Unis pour protester contre la guerre à Gaza.
Chez Google, la situation s'est transformée en un combat public entre les dirigeants et les employés licenciés. Google affirme que chaque travailleur licencié a activement perturbé ses bureaux, tandis que les travailleurs contestent ces affirmations, affirmant que certaines des personnes licenciées n'étaient même pas entrées dans les bureaux de l'entreprise le jour des manifestations. Google a déjà licencié des travailleurs qui l'avaient publiquement critiquée, mais il n'avait jamais licencié autant de personnes à la fois. Selon de nombreux analystes, cela démontre à quel point le projet Nimbus est un sujet sensible pour Google.
Pendant des années, Google a eu la réputation d'être la société la plus libre et la plus ouverte parmi les grandes entreprises technologiques en matière de culture d'entreprise et de collaboration. L'entreprise célébrait une culture interne dans laquelle les employés savaient sur quoi travaillaient les autres équipes et étaient encouragés à remettre en question les décisions des dirigeants. La réaction de Google face aux critiques du projet Nimbus et les mots du PDG Pichai constituent un tournant fort dans les pratiques de l'entreprise en matière de culture de discussion ouverte et dynamique. Ce qui lui vaut de nombreuses critiques.
Dans son message aux employés, Pichai a déclaré que l'ouverture de l'entreprise était une force, mais qu'elle s'appliquait aux sujets liés au travail et non à la politique. « Nous avons une culture de discussion ouverte et dynamique qui nous permet de créer des produits étonnants et de transformer de grandes idées en actions. Toutefois, en fin de compte, nous sommes un lieu de travail et nos politiques et attentes sont claires : il s'agit d'une entreprise », a-t-il déclaré dans la note. Cependant, certains critiques accusent l'entreprise d'avoir favorisé une culture de travail au sein de laquelle les employés pensaient pouvoir tout dire.
« Google a encouragé ses employés à faire de leur travail chez Google leur personnalité à part entière. C'est comme s'ils sortaient avec leur employeur. Aujourd'hui, la plupart des travailleurs se rendent compte que Google n'est qu'une entreprise comme les autres. Ce n'est qu'un travail. Pour payer vos factures. Ne vous investissez pas émotionnellement dans votre entreprise. En outre, c'est une période de licenciement pour les entreprises technologiques, elles sont probablement heureuses de pouvoir trouver une excuse pour réduire leur personnel », a déclaré un critique. Un autre critique de Google a commenté :
Ce qui échappe à certains, c'est que Google s'est lancé à corps perdu dans la construction d'une culture d'entreprise totalement fantaisiste dès le départ, et a même basé les évaluations de performance de ses dirigeants sur ce principe. Pendant longtemps, l'un des critères de mesure de la réussite de l'équipe était le suivant : "je me sens à l'aise pour apporter toute ma personne au travail".
Oui, je m'attends à 100 % à ce que des personnes soient licenciées d'une entreprise après avoir organisé un sit-in et perturbé les activités quotidiennes. Le problème, c'est que Google veut à la fois affirmer "nous ne sommons pas une entreprise conventionnelle" tout en se comportant exactement comme telle.
Le projet Nimbus est perçu comme un soutien à l'armée israélienne, qui est actuellement engagée dans un conflit controversé contre le Hamas dans l'enclave palestinienne de Gaza. Même les estimations les plus prudentes font état d'au moins 30 000 morts dans la guerre actuelle entre Israël et le Hamas, et de nombreuses personnes (y compris de nombreux Israéliens) critiquent la réticence d'Israël à mettre fin à son offensive. Le projet Nimbus, d'une valeur de 1,2 milliards de dollars, a été lancé en 2021 et fait l'objet de vives protestations depuis lors.
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