
selon une étude sur la réforme française qui a réduit la semaine de travail de 39 à 35 heures
Pendant combien de jours ou d'heures les employés doivent-ils travailler par semaine pour éviter le stress et d'autres troubles de la santé ? C'est un vieux débat sur lequel de nombreux dirigeants de PME/PMI, grandes entreprises, scientifiques, salariés et hommes politiques ont donné leurs avis au fil du temps. Deux concepts s'affrontent généralement : le passage à la semaine de travail de 4 jours et le maintien de la semaine de travail de 5 jours. Alors que de plus en plus de personnes sont favorables à des semaines de travail plus courtes, une nouvelle étude française vient de démontrer quelques avantages qu'elles possèdent sur le bien-être.
La nouvelle étude intitulée "L'effet des heures de travail sur la santé" a été publiée dans le numéro de décembre 2020 de la revue scientifique "Economics & Human Biology". Elle a été réalisée par Inés Berniell, de l'Université nationale argentine de La Plata et auteur principale de l'étude, et Jan Bietenbeck, de l'Université suédoise de Lund. Les données sur la santé proviennent d'une enquête menée auprès des travailleurs en 1998, lorsque la réforme a été annoncée, et en 2002, lorsque la réforme a été pleinement mise en œuvre. L'enquête était longitudinale, ce qui signifie que les mêmes travailleurs ont été interrogés à quatre ans d'intervalle.
Plus précisément, Berniell et Bietenbeck ont exploité les données d'une réforme du travail introduite en 1998 par le gouvernement socialiste français qui a réduit la durée légale de la semaine de travail de 39 à 35 heures sans modifier les salaires. La règle, qui a ensuite été abrogée par un gouvernement conservateur, a donné aux chercheurs la rare opportunité d'étudier l'impact du temps de travail à l'échelle nationale. « Les changements exogènes du temps de travail, associés à l'absence de changement des revenus, font du contexte français un endroit unique pour étudier l'impact des heures de travail sur la santé », a déclaré l'économiste Inés Berniell.
Elle a ajouté que d'autres estimations du temps de travail sont généralement confondues par l'influence des heures de travail sur les revenus, qui peuvent avoir un effet indépendant important sur la santé. « C'est très utile, car nous pouvons comparer les mêmes personnes avant et après le traitement », a déclaré Berniell en parlant des données sur lesquelles l'étude s'est appuyée.
Les semaines de travail plus courtes auraient un impact considérable sur le bien-être
Selon le rapport d'étude, la réduction de la durée de la semaine de travail a un impact positif sur les mesures de la santé des travailleurs, y compris l'indice de masse corporelle (IMC) et le tabagisme. Dans le rang des ouvriers (cols bleus), le raccourcissement de la semaine de travail de quatre heures (les heures de travail sont passées de 39 à 35 grâce à la réforme) entraîne une diminution du tabagisme de 19 à 24 %. Ensuite, les auteurs de l'étude ont constaté que pour les employés de bureau (cols blancs), la réduction du même nombre d'heures est associée à une baisse de l'IMC de 1,7 à 2,1 %.
« L'implication clé de ces résultats est que les politiques de réduction du temps de travail, telles que le raccourcissement de la semaine de travail réglementaire, pourraient entraîner d'importants bénéfices pour la santé », a déclaré la coauteure Inés Berniell, économiste à l'Université nationale de La Plata en Argentine. En plus du suivi du tabagisme et de l'IMC, l'enquête a également permis de suivre la santé déclarée par les personnes interrogées. Les deux chercheurs ont constaté que la réduction de quatre heures du temps de travail a augmenté la probabilité d'être en bonne santé selon une estimation imprécise de 2 à 3 %.
Il est intéressant de noter que la réduction du temps de travail n'a entraîné pratiquement aucun changement dans les habitudes tabagiques des employés, et pourrait même avoir augmenté l'IMC chez les ouvriers. Les chercheurs ont déclaré que la différence de variation de l'IMC entre les employés et les ouvriers pouvait être attribuée aux différences d'activité physique sur le lieu de travail et en dehors. « Une explication possible de ce schéma de résultats est que les cols blancs traités utilisent une partie du temps libre supplémentaire pour faire de l'exercice, ce qui fait baisser leur IMC », ont écrit Berniell et Bietenbeck.
« Au contraire, les ouvriers brûlent probablement plus de calories au travail, et ils ne parviennent pas à compenser la diminution de l'activité physique liée au travail due à la semaine de travail plus courte, ce qui augmente leur IMC », ont-ils ajouté. En outre, il est également important de noter que l'échantillon principal du groupe n'incluait pas de femmes. Berniell a déclaré avoir pris la décision d'exclure les femmes parce qu'elles étaient plus susceptibles de travailler à temps partiel, ce qui signifie que la réforme de la semaine de travail a eu un effet beaucoup moins significatif sur leur échantillon.
« Je me mets généralement en colère lorsque je vois un article en économie, généralement en économie du travail, qui ne s'intéresse qu'aux hommes, car il exclut la moitié de la population. Mais ce cas est particulier : nous nous concentrons sur les hommes de notre échantillon parce que ce sont les hommes qui ont réduit leur temps de travail après la réforme », a déclaré Berniell. « La réduction différentielle des heures pour les femmes traitées est assez faible et ne nous permet pas d'étudier les effets des changements d'heures sur la santé des travailleurs, c'est pourquoi nous les excluons de l'échantillon principal », a-t-elle ajouté.
Enfin, le rapport précise aussi que l'échantillon principal a également exclu tous les cadres et les travailleurs à temps partiel. Berniell a eu l'idée d'étudier les effets de la réforme française sur la santé en 2010 dans le cadre de son mémoire de maîtrise. Elle a ensuite mis cette idée de côté pendant plusieurs années avant de travailler avec Bietenbeck pour en rédiger une nouvelle version en 2016.
L'expérimentation de la semaine de travail de 4 jours s'élargit dans le monde
La semaine de travail de quatre jours au lieu de cinq continue de plaire à plus d'un. De plus en plus de sondages révèlent que les travailleurs sont bien d'accord pour travailler quatre jours au lieu de cinq par semaine, même s'il faut travailler plus pendant ces quatre jours. En mai 2019, un sondage réalisé par ADP Paie a révélé que 60 % des Français sont favorables pour travailler quatre jours au lieu de cinq par semaine, tout en travaillant beaucoup plus s'il le faut. Environ 17 % des répondants du sondage seraient d'accord pour passer au temps partiel avec diminution de salaire.
En effet, ces dernières années, plusieurs enquêtes ont conclu que les travailleurs seraient plus productifs en travaillant 4 jours sur 5 par semaine. Cela pourrait sembler trop beau pour être vrai, mais les entreprises qui ont réduit leur semaine de travail ont constaté que cela entraînait une productivité accrue, un personnel plus motivé et une réduction de l'épuisement professionnel. « C’est beaucoup plus sain et nous faisons un meilleur travail si nous ne travaillons pas à des heures folles », a déclaré Jan Schulz-Hofen, fondateur de la société berlinoise de logiciels de gestion de projets Planio, dont les employés travaillent 4 jours par semaine.
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